Critique de
Jean-Paul Gavard-Perret

 

"Trans­fi­gu­ra­tions"

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Subli­ment éro­tiques et méta­phy­siques chants d’un amour ter­restre et men­tal, les textes de Cathe­rine Andrieu sont incan­des­cents et nous pou­vons oser le mot de sublime en droite ligne des grandes poé­tesses surréalistes.

“J’aime comme tu bouges tes doigts, c’est tel­le­ment éro­tique l’intelligence” pour­rait être une syn­thèse de ces chants où la femme tra­verse les temps et les miroirs.
L’amour n’est jamais donné là pour acquis, d’où ces suites où l’imaginaire com­plète l’existence dans ce qui pour­rait paraître pur vaga­bon­dage ou asso­cia­tion libre mais qui est bien plus que cela.

Dans un rythme d’écriture sin­gu­lier, Cathe­rine Andrieu laisse le lec­teur à la fois guidé mais aussi aba­sourdi et sonné par un che­min d’errance (flé­chée) en sa com­pa­gnie et dans un élan presque irré­pres­sible vers elle. Ce com­pa­gnon­nage char­nel et spi­ri­tuel témoigne d’un monde fas­ci­nant, émou­vant et volup­tueux.
Les méta­mor­phoses créent un fleuve Amour qui n’a rien de tran­quille et qui pousse à la dis­tance comme à l’intimité.

Existe ici tout ce qui vient du désir et qui reste inex­pli­cable.
Et la force de ces livres reste de lui consen­tir, en pure sen­so­ria­lité de “mam­mi­fères mys­tiques”, son Vésuve là où l’écriture nous dévore littéralement.

 


"Le Mino­taure de Catherine"

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Il faut se lais­ser empor­ter par les vagues de la prose poé­tique de Des nou­velles de Mino­taure ? Cathe­rine Andrieu y donne la pleine puis­sance de son lan­gage et de son ima­gi­naire.
Celle qui se dit “mys­ti­fi­ca­trice” reste pour­tant à mille lieues du fac­tice. La force méta­pho­rique devient cha­ma­nique en sor­tant du plus pro­fond de son être. Si bien que le poé­sie aussi intime que cos­mique devient un rite sidé­ral et sidé­rant, per­son­nel et ini­tia­tique comme l’est la danse pour les der­viches tourneurs.

Entre réel et irréel, entre les diverses per­sonnes du sin­gu­lier, entre réflexion et envol, s’inscrit un lent dérè­gle­ment des sens. Il trans­forme la poé­tesse et celui ou celle à qui elle s’adresse en “un chaos gou­verné par un rythme”.
Et là où Piano sur l’eau jouxte un expé­rience bio­gra­phique intime, Des nou­velles du Mino­taure ? ins­crit un registre plus orphique.

Cet ensemble est ful­gu­rant là où la femme prend au besoin tous les rôles — vierge ou catin — mais reste par­faite dans l’innocence d’avoir si peu d’histoires dans le geste, même si elle peut retour­ner cette atti­tude en un magis­tral contre-exemple.
La réunion de ces textes de la véri­table femme sur­réa­liste de notre temps devient rade, radeau, rec­tangle mou­vant, carré de sécu­rité, aire de perdition.

Nous pou­vons y déchif­frer un vide ver­ti­cal : celui du ver­tige qui en est le contenu.

 


"Poétesse de l’effacement"

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Ecrire per­met de par­ler. C’est aussi un esto memor et un “fra­gile bégaie­ment de la beauté” et d’une cer­taine musique lorsqu’il ne reste que peu de choses avant de s’estomper.
C’est pour­quoi tout poète digne de ce nom est un illusionniste.

Cathe­rine Andrieu le prouve, moins pour trom­per les autres que le temps qui passe.
C’est aussi une manière de faire le point avant que la nuit tombe et avec elle le der­nier mot.

Existe là une sen­sa­tion étrange qui pro­longe la quête d’un Beckett. Cathe­rine Andrieu devient comme lui un poète de l’effacement. Moins dure que celui dont elle devient une héri­tière puta­tive, elle ménage — pour finir encore — des mots plus doux que les siens.
Et c’est ce qui fait tout le prix d’un tel livre rare.

 

"Cathe­rine Andrieu fausse mys­ti­fi­ca­trice"

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Celle qui se dit “mys­ti­fi­ca­trice” donne la pleine puis­sance de son lan­gage et de son ima­gi­naire. Elle reste pour­tant à mille lieues du fac­tice. La force méta­pho­rique devient cha­ma­nique en sor­tant du plus pro­fond de son être. Si bien que le poé­sie aussi intime que cos­mique devient un rite sidé­ral et sidé­rant, per­son­nel et ini­tia­tique comme l’est la danse pour les der­viches tourneurs.

Entre réel et irréel, entre les diverses per­sonnes du sin­gu­lier, entre réflexion et envol, s’inscrit un lent dérè­gle­ment des sens. Il trans­forme la poé­tesse et celui ou celle à qui elle s’adresse en “un chaos gou­verné par un rythme”.
Et là où Piano sur l’eau jouxte un expé­rience bio­gra­phique intime, Des nou­velles du Mino­taure ? ins­crit un registre plus orphique.

Cet ensemble est ful­gu­rant là où la femme prend au besoin tous les rôles — vierge ou catin — mais reste par­faite dans l’innocence d’avoir si peu d’histoires dans le geste, même si elle peut retour­ner cette atti­tude en un magis­tral contre-exemple.
La réunion de ces textes de la véri­table femme sur­réa­liste de notre temps devient rade, radeau, rec­tangle mou­vant, carré de sécu­rité, aire de perdition.

Nous pou­vons y déchif­frer un vide ver­ti­cal : celui du ver­tige qui en est le contenu.

 

 


"Dans l'intimité du processus créatif"

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Parant de sa réalité et de ses fantasmagories, ses aveux Catherine Andrieu, oblige à pénétrer au coeur de sa création et à nous interroger à travers ses mots de corps et par le corps de ses mots sur ce qu'ils dévoilent.

Ils dépossèdent d'un royaume que nous croyons acquis pour nous porter vers les errances, les orages d'une femme secouée par une "folie" émettrice autant d'une douleur que d'un rêve immense. Se découvre un univers féminin particulier, fourmillant. Il donne accès au questionnement sur l’intégrité et l'identité corporelle. A partir de là la création fait qu'une telle poétesse et amoureuse blanche devient une fée. Elle corrige le mauvais sort, le rend moins définitif.

"La femme qui écrit" comme elle se définit agit avec son histoire, sa chair, ses connaissances littéraires, philosophiques, artistiques, spirituelles en restant toujours dans l'émotion. Celle-ci trouve les mots pour se dire, des mots de magicienne où se croisent les silhouettes superposées de jumelles du passé dont les visages sont à l'origine d'une écriture de mémoire et de futur dans un présent qu'elle creuse en ultime femme - donc la première - surréaliste.

 

"Contre toute attente"

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Evoquant de sa réa­lité et de ses fan­tas­ma­go­ries, les aveux, Cathe­rine Andrieu, oblige à péné­trer au coeur de sa créa­tion et à nous inter­ro­ger, à tra­vers ses mots de corps et par le corps de ses mots, sur ce qu’ils dévoilent.
Ils dépos­sèdent d’un royaume que nous croyons acquis pour nous por­ter vers les errances, les orages d’une exis­tence émet­trice autant d’une dou­leur que d’un rêve immense.

Se découvre un uni­vers fémi­nin par­ti­cu­lier, four­millant. Il donne accès au ques­tion­ne­ment sur l’intégrité et l’identité cor­po­relle. A par­tir de là, la créa­tion fait qu’une telle poé­tesse et amou­reuse blanche devient une fée. Elle cor­rige le mau­vais sort, le rend moins défi­ni­tif.
Créant de manière sen­so­rielle et médium­nique ce qu’elle nomme une “lit­té­ra­ture d’atmosphère” héri­tée entre autres de Duras, Beckett, Gide, Cathe­rine Andrieu pro­pose et expli­cite ici ses propres nour­ri­tures ter­restres et habi­tées. Se révèle et se relève toute une vie entre rêve­rie et tour­ment qui, dans son oeuvre poé­tique, acquiert une écri­ture des plus originales .

Dans son aven­ture de cha­mane sur­réa­liste, Cathe­rine Andrieu devient créa­trice de “légendes” où l’intensité de la volupté poé­tique a rai­son de la douleur.

Entre réel et irréel, entre les diverses per­sonnes du sin­gu­lier, entre réflexion et envol, s’inscrit un lent dérè­gle­ment des sens. Il trans­forme la poé­tesse et celui ou celle à qui elle s’adresse en “un chaos gou­verné par un rythme”.
Et là où Piano sur l’eau jouxte un expé­rience bio­gra­phique intime, Des nou­velles du Mino­taure ? ins­crit un registre plus orphique.

Cet ensemble est ful­gu­rant là où la femme prend au besoin tous les rôles — vierge ou catin — mais reste par­faite dans l’innocence d’avoir si peu d’histoires dans le geste, même si elle peut retour­ner cette atti­tude en un magis­tral contre-exemple.
La réunion de ces textes de la véri­table femme sur­réa­liste de notre temps devient rade, radeau, rec­tangle mou­vant, carré de sécu­rité, aire de perdition.

Nous pou­vons y déchif­frer un vide ver­ti­cal : celui du ver­tige qui en est le contenu.

 

 


"Vers l’ouverture"

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Faisant retour à un certain classicisme poétique, Catherine Andrieu  trouve  de quoi nourrir un double mouvement existentiel entre Eros et Thanatos. Paradoxalement se soumettre aux règles de la versification lui permet d'être plus libre et de s'oser dans le désir même si la maladie et ses enfers demeurent présents.
Existe là une catharsis implicite où âme et corps ne font qu'un. Si bien que même si "une partie de moi fut perdue", l'appel des sens demeure ce qui n'est pas sans entraîner des égarements presque voluptueux quoique marqués sinon de repentance, du moins d'une sorte de culpabilité.
Créative, Catherine Andrieu le reste comme elle s'accroche à son écriture nourrie de peintres (Van Gogh, Gauguin, Dali) et d'écrivains (de Kundera à Robbe-Grillet, de Gide à Cioran ou Duras) qui lui permettent de nourrir autant son âme "monstrueuse" que son regard "clair" à travers sa poésie. Celle-ci montre ce qu'une telle auteure rare et importante  a "dans le ventre" et ne laisse pas placide - tant s'en faut.

 


"Catherine Andrieu scriptographe de l'amour"

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"Les mou­ve­ments d’amour"

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Catherine Andrieu à la fois exacerbe et renverse les données du processus libidinal qu’elle induit et provoque. Est-ce comme l'écrivit Yourcenar pace que « Les Français ont stylisé l’amour, ils y ont cru et se sont obligés de le vivre. Ils l’auraient vécu différemment s’ils n’avaient pas toute cette littérature derrière eux ». Ce n'est sans doute pas le cas pour celle qui attrape le désir par l'échine en hommage à un certain surréalisme.

Si chez une telle auteure la liberté fut plus imaginaire que réelle, ici Eurydice, sans oser se mouiller en rameutant ce qui lui est arrivé et qui l'a conduit vers l'ouverture en rameutant un lyrisme si particulier de celle qui est mer, terre, étoile et mouette à la portée du cliquetis des mats percussionnistes de ses diverses amours

Un « temps » paradoxal émane étrangement en des surfaces faites d'aveux. Cela fait penser sur le plan de l’effet de vision à la fameuse anecdote sur Giotto. Jeune élève de Cimabue il peignit de manière si frappante une mouche sur le nez d’une figure commencée par son maître, que celui-ci, en se remettant au travail, essaya plusieurs fois de la chasser avec la main avant de s’apercevoir de sa méprise… A sa manière Catherine Andrieu est une Giotto « scripturographe » des émois amoureux.

Entre l’extériorité lumineuse et le repli des plus impudiques elle lie sans cesse l'ouvert et le retrait. L'acte de délimiter l'espace par l’effet de grossissement de la lentille revient d’ailleurs à porter encore plus à découvert l’infime et la libre vastitude. On se souvient alors qu'être sur terre veut dire être sous le ciel (de lit). Et il n'est plus besoin de diviniser les astres pour éprouver la (douce) contrainte de la station terrestre et le sentiment des effluves des douleurs et des voluptés.

 


"L’absolu et son mâl(e)"

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Les moti­va­tions de Cathe­rine Andrieu tra­versent sa vie et ses expé­riences amou­reuse. Elle crée une série dans laquelle cette repré­sen­ta­tion s’exprime à tra­vers une approche sur­réa­liste.  Mais sa vie trouve l’occasion de se regar­der sans filtre, de médi­ter sur la perte de ses cer­ti­tudes et sur le néant qui l’angoisse. Bref, des thèmes qui font par­tie de  de tels textes.

Une danse, un mou­ve­ment entre les corps et leurs « per­for­mances » créent des fusion, des com­mu­nions. La créa­trice se consacre à ce qui se pas­sait. Elle met en évi­dence le rejet, le conflit et la dif­fi­culté du pro­ces­sus, la recherche d’une union qu’elle a entre­vue, mais qui n’a pas encore tou­jours eu lieu. Entre la soif de la déso­la­tion et la force indomp­table se recons­truit, au fur et à mesure, un pro­ces­sus de trans­for­ma­tion qui est en cours.

Cathe­rine Andrieu confronte à la réa­lité aux por­traits des amants. Sur­git ce que Pas­cal Qui­gnard appelle Le sexe et l’effroi mais aussi un sacré dans une recherche d’absolu dont l’impossible tarde. C’est un com­men­ce­ment sans fin, et l’activation d’une nou­velle archive, une recherche d’équilibres dif­fé­rents et aussi la révé­la­tion des traces de l’aimante.
Les textes imprègnent sur­tout les embran­che­ments des amou­reux  et leurs traumatismes.

 


"Les infarctus de coeur de Catherine Andrieu"

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Le fameux titre du journal intime de Baudelaire, Mon cœur mis à nu, correspond parfaitement aux espoirs et dérives de Catherine Andrieu poète exceptionnelle mais blessée profondément  par ses amours premières ou plus anciennes.


Les éditions Rafaël de Surtis de Paul Sanda ont compris l'envergure  d'une telle œuvre. Et ce nouveau corpus renoue  avec les infarctus sentimentaux pour celle qui ne voit  l'intérêt de sa vie que dans la vérité de l'amour. Elle en a payé et paie encore le prix fort.


La force émotionnelle des affects, certaines tortures mentales de manipulateurs, l'érotisme qui parfois pour d'autres hommes culbute dans la viande ou la vanité jaillissent de la tempête intérieure d'une poétesse qui reste la dernière des surréalistes mais la jeunesse de l'exigence d'un lyrisme particulier original.


Catherine Andrieu s'appuie sur l'idée du chemin, de la trace, de la possibilité du voyage. Elle exploite non le plein mais l'interstice pour  montrer ce qui s’y passe là  où se dessine poétiquement la représentation physique du parcours invisible de l’être et de son affect.


Ces différents temps de l'œuvre, en cette série de  rhizomes, deviennent le sceau  de la multiplicité des histoires d'âme et de corps. Elles construisent l'expérience d'une telle femme d'exception livrée sur son quai des brumes et goélands de l'Océan.

 

 

Catherine Andrieu, Des nouvelles de Léda ?

RAL'M

 

Dans cet ensemble de textes des courants d’énergie libidinale et mystiques appellent à la rencontre impossible, au seuil infranchissable. Ce qui se soustrait est tout autant offert en une absence présence. N’y manque que l’humour : mais il ne peut se profiler lorsque manque l’amour. L’auteur l’attend non au-delà mais ici même dans sa solitude extrême qui la fait voyante même de ses voyeurs. Elle connaît leur obscur mais s’adresse encore à eux.

Enfreignant par exemple la règle qu’une belle jeune fille, celle-ci ramène parfois par la mort qu’elle fréquente à une forme de Vanité. Le passage du temps, cruel pour la beauté, devient le passage vers la chair laissée à la dévoration du Dieu-Temps.

Catherine Andrieu ose parfois préfiguration de la femme devenant vieille et aux chairs molles. Elle retient par exemple de ses deux mains ses seins lourde. Chair pendante, sa poitrine  n’est donc pas celle d’une jeune femme, comme si la beauté était toujours déjà vouée à la mort.

La source véritable serait-elle alors Métaphysique ? Il y a en cette femme de l’ordre de l’acceptation de l’inéluctable. L’artiste apparaît ainsi comme la peintre de "ce qui est".

Ecoutons là. Car elle nous manque. Comme nous lui manquons sans doute toujours un peu. Nous dérivons parfois en rêvant de partager sa couche où nous joindrions nos nudités. Mais sans doute ce pas au-delà serait un pas impossible. Ou de trop. Ecoutons là plutôt dire ses symptômes et les nôtres. Et évoquer écarts, ruptures et convulsions lentes.

 


Catherine Andrieu, Des nouvelles de Léda ?

Recours au Poème

 

Les lecteurs des textes de Catherine Andrieu deviennent ses voyeurs obligés. Ils projettent sur la femme, son corps, son âme ce qu’elle en dit. Les voici soumis à ce flux et démultiplié car l’œuvre est aussi profondément spirituelle et ailée que charnelle et érotique.

Parfois cela peut sembler cruel du moins pour un public effarouché. Surtout lorsqu’elle évoque l’amour même si, au fond, Catherine Andrieu demeure pudique et presque platonique. Bref nue de nuées.
 
Pourtant sa poésie dérange car il n’est pas jusqu’à la vulve parfois béante de s’ouvrir sur l’imaginaire. Le lecteur se plait alors à considérer l’auteur coupable de nous imposer son implicite injonction : “regarde !”.  Mais dès lors il est obligé de s’infiltrer par où ça passe et ne finit jamais de s’enfoncer.
 
La vie s’y rattache — même dans ses envolées là où l’auteur enjoint de regarder par le trou de sa serrure pour voir non seulement ce qu’on espère mais aussi des abysses de l’existence puisque de l’enfance à aujourd’hui, de la Méditerranée à l’Atlantique Catherine Andrieu nous offre sa vie. Pas toutefois comme un festin nu. Car il y a bien plus. La douleur demeure même si parfois l’auteur la cache sous une mantille.
 
Comme Artaud, elle est à sa manière une suicidée (encore en vie) de la société dont elle fait partager le sort des victimes. Elle est à ce titre la “différante” (pour emprunter le néologisme de Derrida). Elle tient debout dans ses textes comme si c’était un miracle de l’amour même lorsqu’il chute et ce pour dire l’absence et le manque. L’accomplissement toutefois n’est pas oublié. Il est plus même plus qu’une thématique : il devient la poésie et sa présence. Bref son essence.

 

Ce qui est masqué dans les abîmes de l’être l’auteure le révèle en nous faisant participer à sa quête. Sur le blanc de chaque page nous retrouvons l’épreuve de l’épaisseur humaine nourrie de bien des mythes (et des chats) qui participent à une telle éclosion contre les occlusions de l’âme et les ratés du corps.
 
Tout un monde intérieur est là entre orgasme et douleur dans un effet de sublimation où le cri du cœur trouve des mots pour se dire. De la crudité facile il n’est jamais question mais de vérité. Et c’est un honneur de la présenter par celle qui lie la poésie à l’érotisme, l’art à la matérialité de l’âme de même que ses diverses postulations complexes à son envie d’être en vie malgré sa charge de supplices.
 
Si bien que c’est l’inconscient qui s’ose et parle. Catherine Andrieu devient Vénus, Sainte Thérèse et Madame Edwarda confondues.

 


Catherine Andrieu, Initiations

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L’amour et ses secrets

Cathe­rine Andrieu nous emmène dans un conte emprunté (à qui la connaît) à sa vie. Il faut s’y lais­ser por­ter et suc­com­ber comme l’héroïne par l’amour et son cou­rant qui nous trans­porte dans un autre uni­vers même si une telle pas­sion subit de gré mais sur­tout de force des sortes de col­lap­sus que l’on finit par com­prendre comme s’ils étaient ten­dre­ment mater­nels et comme si une telle « pou­pée » au visage « pâle comme la lune » pou­drée de sens et sen­sua­lité va res­sus­ci­ter en gloire.

Elle garde ses secrets mais son his­toire est contée par Cathe­rine Andrieu qui elle-même devient l’enchanteresse de tous les sorts pos­sibles. Sur­gissent des bouillon­ne­ments de l’univers à la Lewis Car­roll. Mais avec notre auteure, un cos­mos cha­toyant pousse au mer­veilleux même si la joyeuse fébri­lité verse par­fois dans l’angoisse et la cruauté.

Des corps tapissent leur pul­sions, d’autres — non méca­niques — par­tagent un fluide, une danse tel­lu­rique, une matière vive là où, par cette nou­velle légende, la ques­tion de la vie et de la mort se mêle à la quête de sens. L’animal lui-même prend diverses valeurs : le lion est for­cé­ment car­ni­vore, mais le chat — sans for­cé­ment être du Che­shire — laisse à la femme-enfant pro­fi­ter d’un essor.

Ce chant et ses frag­ments de contes ne nous conduisent pas au néant mais, tout au contraire, nous invitent à retrou­ver notre corps, le cœur vivant de la res­pi­ra­tion, l’appel d’air et au don de soi. Par­fois, au sein d’un tel mythe, nous sommes par­fois vides de Dieu et sexués puisque le terme de sexua­lité est un autre mot pour dire sépa­ra­tion et déchi­re­ment.
Mais les ini­tia­tions cos­miques créent la dis­tance et l’attirance, le manque et l’attrait. Face au chaos divisé, le monde rede­vient un jeu de forces appe­san­ties mais sau­vées par l’amour.

 


Catherine Andrieu, Les griffes d’Obsidienne

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Entre mythe et réalité

Cathe­rine Andrieu pour­suit sa légende de la femme abso­lue aux che­veux de neige avec sa pan­thère. Elle est sui­vie et obser­vée par l’enfante blonde dont la nar­ra­trice est le double. Êtres et objets deviennent plus qu’étrangers dans un monde cos­mique et fores­tier là où les quatre élé­ments de l’univers sont le bré­viaire d’une femme. Dans un tel conte, de para­doxaux velou­tés et volup­tés s’ébauchent dans un clair-obscur et un peu d’ombres, de rondes et de croches car l’auteure bat au rythme de l’univers, la peur, la joie et l’espérance accou­plées dans l’instant d’une mort qui s’éternise.

Cette recou­vrance prend la force d’une évi­dence et tout viol est un coup de cou­teau dans le bas ventre. L’enfante presque nar­ra­trice se noie dans le brouillard, mais celle qu’elle a per­due brille. Elle ramasse ses pro­messes de jadis même si elle s’est don­née à l’inconnu du saut. Ici, mythe et vérité se confondent pour retrou­ver un temps « mort » contre celui qui n’a pas cessé d’être.
Et de fait, pour Cathe­rine Andrieu, écrire un tel livre, c’est se défier du ciel ortho­normé et bien sûr se sou­ve­nir d’une jour­née de soli­tude qui aurait dû être accom­pa­gnée et pleine. Par ce conte « engagé », la poète a aimé dans les sou­pirs et les larmes. Mais quelle peine tour­mente cette enfant qui lui res­semble ? Celle qui devient sa propre insé­cable solitude.

L’écrire, ce serait pleu­rer sans rai­son. Mais, larmes omises, ici les pages s’éclairent dans le silence du mythe, sa contem­pla­tion et le saut dans l’inconnu(e). D’autant que Cathe­rine Andrieu connaît mieux que tous les autres poètes les nuances, la valeur des conno­ta­tions, l’importance du contexte, celle de la syn­taxe (parce que la place dans le tissu du texte est au moins aussi impor­tante que le choix du mot…), etc. Mais ce n’est pas seule­ment cela. Pour l’écrivaine, la poé­sie est plus qu’une col­lec­tion de beaux mots et voie plus qu’une orai­son spé­ci­fique : une des­cente dans les pro­fon­deurs de la psy­ché et ses troubles.

Dans ces expé­riences d’écritures sur­réa­listes et exis­ten­tielles, le mot n’a pas seule­ment un emploi déco­ra­tif, de bel embal­lage, mais un rôle de créa­tion, il est direc­te­ment impli­qué dans des expé­riences ris­quées. A la dif­fé­rence du peintre ou du musi­cien, une telle auteure pré­serve comme matière pre­mière des vocables. Preuve qu’une poète via la légende avoue ses cha­grins d’amour et d’autres sortes, mais aussi ses sen­sa­tions esthé­tiques, et — pour­quoi pas — ses réflexions phi­lo­so­phiques.
La parole n’étant plus consi­dé­rée sim­ple­ment comme un véhi­cule, l’essentiel pour l’auteure oblige qu’elle soit magique et sen­sible en pro­dui­sant bien des effets sur nous.

 

Cathe­rine Andrieu, Les griffes d’Obsidienne, Pré­face de Patrick Cin­tas, Rafael de Sur­tis édi­teur, Cordes sur Ciel, 2024, 40 p. — 18,00 €.

 


Catherine Andrieu, Les griffes d’Obsidienne

RAL'M

 

Dans ce superbe conte poème en prose en un si long voyage dans le temps comme dans la vie de Catherine Andrieu à chacun d’en comprendre, dans bien de concordance des temps. La poétesse ne récrit jamais le double de ce qui a déjà été dit et ne tire jamais la laisse du chien de la mélancolie (ou de Goya lui-même). Chez elle une odeur de neuf relie la terre au ciel et vice-versa si bien que - paradoxe - son écriture est plus ruisseau que pluie.
 
En une forme d’expérience d’écritures surréalise et t existentielles le mot n’a pas seulement un emploi décoratif, de bel emballage, mais un rôle de création, il est directement impliqué dans des expériences risquées. A la différence du peintre ou du musicien une telle auteure préserve comme matière première des vocables. Preuve qu’une poète via la légende nous avoue ses chagrins d’amour ou d’autre sorte, ses sensations esthétiques, ou, pourquoi pas, ses réflexions philosophiques ; la parole n’étant plus considérée simplement comme un véhicule, l’essentiel pour l’auteur étant qu’elle soit magique et sensible qui a un effet sur nous.
 
Contrairement à lire les productions lyriques des velléitaires qui savent très bien que la sincérité du sentiment ne donne pas obligatoirement de la poésie.Ici à l’inverse un tel texte poétiques découvre des traces de l’existence de l’auteur, une autre histoire et un mécanisme de la transposition du vivant.
 
Pour Catherine Andrieu il n’y a pas de “règles” sinon l’approche d’une pour sublimation. Tout chez elle tient du domaine de la surprise, du vécu du poète qui peut se traduire soit dans une image, soit dans une particularité de poème en prose dans une succession secrète de séquence. L’émotion a une place importante dans l’existence de l’auteure qui n’a pas de valeur poétique descriptive qu’en elle-même. C’est la même chose avec la philosophie qui nous est communiquée par cette poésie dont les combinaisons des mots de textes poétiques peuvent quelquefois nous proposer des idées mais il ne s’agit pas des mêmes réflexions que celles, argumentatives, des philosophes.

 

Cathe­rine Andrieu, Les griffes d’Obsidienne, Pré­face de Patrick Cin­tas, Rafael de Sur­tis édi­teur, Cordes sur Ciel, 2024, 40 p. — 18,00 €.

 


Catherine Andrieu, Les griffes d’Obsidienne

Recours au Poème

 

Cérémonie secrète de Catherine Andrieu


Catherine Andrieu peut employer dans sa construction textuelle tout une archéologie du mythe des profondeurs de la terre et de l’obscurité pour raconter une histoire. Son récit ici et comme souvent est une vision très personnelle.  Au paysage classique se superpose réel du passé et du présent. Si bien que tout s’imbrique entre faits, légendes, vérités possibles, mythologies lointaines afin de traduire et renforcer le sens de la cavité, entendue comme un espace générateur où peut se lire non seulement le mythe de la caverne de Platon mais l’antre du féminin.

La contrainte d’une telle créatrice  l’artiste est moins la recherche d’un « paysagisme »  mais  le besoin de revenir sur une île mémorielle de sa propre enfance et ses amours  ambivalente car elle peut à la fois se retrouver l’enfante (blonde)  qui sommeille en elle et se voit confronté, par le biais de la conscience adulte de la narratrice, à la mémoire de l’inéluctable cycle naturel entre ouverture et dénouement : la représentation poétique ici autorise à remonter les temps. Un n’est jamais seul.
 
Que voit-on naître de la nuit et la ruine de l’empire du mythe de la femme aux cheveux de neige accompagnée de sa panthèree ? C’est la mort qui scrutait en elle par les envahisseurs. Mais une enfante blonde (double de la narratrice et auteure)   claque les portes.
 
Pour elle  le soleil n’est jamais trompeur. Nous retrouvons ici une langue altière même en « phrases crevées ». D’autant qu’elles ne sont jamais grevées d’absence. Le tout est de nager dans une eau qui malmène. Mais non sans plaisir même lorsque certaines situations peuvent être parfois douloureuses.
 
Dans ce superbe conte poème en prose en un si long voyage dans le temps comme dans la vie de Catherine Andrieu à chacun d’en comprendre, dans bien de concordance des temps. La poétesse ne récrit jamais le double de ce qui a déjà été dit et ne tire jamais la laisse du chien de la mélancolie (ou de Goya lui-même). Chez elle une odeur de neuf relie la terre au ciel et vice-versa si bien que — paradoxe — son écriture est plus ruisseau que pluie.
 
Une telle affaire est entendue en touches « sur les toits d’un goût de chose lue dans l’aboiement de l’air » mais l’auteur ne joue ni l’ange ni la bête. Il lessive le connu pour extraire d’un tel essorage les « volupté des voluptés » et son contraire. Se capte l’insaisissable de l’intime mais sans la moindre ostentation du lyrisme — cette frangipane souvent indigeste dans la pâtisserie commune des poètes.

 

Le tout à la recherche de la transparence passe par l’opacité qui nourrit la complexité de l’auteur et de son aimée qui innerve ce livre (et pas seulement celui-ci). Après tout et au nom de ce que l’amour « fait » les deux corps de ce couple d’élection sont réels, fantasmés, vibrants (une telle expérience est connue à tout « amourant »).
 
Dans ces expériences d’écritures surréalistes tt existentielles le mot n’a pas seulement un emploi décoratif, de bel emballage, mais un rôle de création, il est directement impliqué dans des expériences risquées. A la différence du peintre ou du musicien une telle auteure préserve comme matière première des vocables.
 
Preuve qu’une poète via la légende  nous avoue ses chagrins d’amour ou d’autre sorte, ses sensations  esthétiques, ou, pourquoi pas, ses réflexions philosophiques; la parole n’étant plus considérée simplement comme un véhicule, l’essentiel pour l’auteur étant qu’elle soit magique et sensible qui a un effet sur nous.
 
 Plutôt que de parler de déconstruction de l’image il faut insister plutôt sur la présence d’une autre narrativité. Elle inscrit la distance plus que la dérision afin de porter un « message » social ou politique souvent fort car implicite : puisqu’il oblige le spectateur à construire sa propre lecture et analyse
 
L’intelligence préside à ce travail. Toutefois l’émotion n’est pas absente. D’où la féerie proposée en forme jamais violente. Néanmoins tout est fait sinon pour atténuer les effets de l’affect du moins pour ne pas les afficher afin qu’ils ne cannibalisent en rien le propos iconoclaste. Dès lors la féérie est volontairement glacée. Existe là une forme d’inter-lucidité impressionnante chez cette poétesse surréaliste par excellence.

 

Cathe­rine Andrieu, Les griffes d’Obsidienne, Pré­face de Patrick Cin­tas, Rafael de Sur­tis édi­teur, Cordes sur Ciel, 2024, 40 p. — 18,00 €.